Appel à auteurs pour le numéro 84 de la revue Le Sociographe « La norme sous toutes ses formes »

La norme sous toutes ses formes

N° 84, parution décembre 2023.



Dépôt des manuscrits jusqu’au 1er juin 2023 (par mail : gnoel.pasquet@faire–ess.fr) en mentionnant vos coordonnées (téléphonique et postale).



La norme, dans les établissements sociaux, médico–sociaux, sanitaires, les écoles de formation en travail social ou sanitaire, vient jalonner la vie professionnelle sous forme de réforme, de décrets, de lois. Certains deviennent des ingénieurs de prévisionnels budgétaires, sont assujettis à des documents administratifs quantitatifs et qualitatifs à produire annuellement, doivent rendre compte de quantité de données statistiques ; d’autres se retrouvent à être des ingénieurs de formation ; et d’autres encore doivent se référer aux autorisations pour l’organisation de la moindre activité. Devons–nous être dans l’accompagnement normatif ? Mais qu’est–ce être dans la norme ? La norme a–t–elle l’objectif de normaliser les profils de chacun, des étudiants, des professionnels, des usagers ? La norme est–elle ce qu’il faut viser ou au contraire, ce dont il faut dépasser ?

Être normal est une demande fréquente des cours de récréation, des établissements médico–sociaux ou des centres de rééducation fonctionnelle par exemple. Lorsqu’on n’appartient pas au groupe considéré comme « normal », la demande de pouvoir y accéder est très forte. A contrario, pouvoir se distinguer de la masse pour gravir les échelons, sortir de l’anonymat, se hisser, sortir de la norme est une vertu, une appétence, un désir qui convoque bien des efforts. Autant d’effort pour entrer dans la norme que pour en sortir !

La norme semble bien une référence à partir de laquelle il s’agirait de pouvoir varier : s’en approcher quand elle est loin et s’en éloigner lorsqu’elle est trop proche. La norme comme ce qui reste toujours inatteignable et comme ce de quoi il faut s’émanciper dans une variation acceptable jusqu’à un certain point. Qu’elle est la variabilité d’une norme ? Est–on soumis à la norme ou en sommes–nous producteurs ? À quelles conditions ? La différence entre normalisation et normativité a–t–elle toujours un sens ?

Également, comment se manifeste une norme ? Est–elle une règle, un règlement, un protocole, une prescription, un code, une mesure, une loi, un précepte, un ordre, un usage, une habitude, un ordinaire, un idéal, un paradigme, une référence, un modèle ? Est–ce celle qui nous contient, nous oblige ? Est–ce celle qui nous autorise des transgressions ? La norme fait–elle autorité ? La norme évolue–t–elle avec le temps, les époques, les avancées technologiques, nos connaissances ?

L’utilisation des « progrès numériques » dans la formation à distance, les consultations médicales ou psychologiques en « visio » sont–elles une norme qui s’impose comme une amélioration où pour suppléer un manque de moyens, des économies ou compenser les déserts médicaux, le manque de pouvoir d’achat, le manque de temps ou la difficulté de rencontre ?

Dans nos sociétés techniques et même sanitaires, le nombre de normes semble aller croissant. L’affichage des « normes iso » et autres certifications abondent et fleurissent un peu partout. Mais trop de normes ne tuent–elles pas la norme ?

Les réformes, règlements, protocoles et autres bonnes pratiques n’apparaissent–ils pas comme des excroissances de normes qui voudraient encadrer nos accompagnements ? Qu’est–ce que cela suscite ? Quel épuisement cela entraîne ? Est–ce que cela laisse la place à une réflexion sur nos relations ?

En formation en travail social, s’attacher à respecter les exigences des référentiels, travailler sur les domaines de compétences, les unités d’enseignement, les blocs…, autant de réformes qui transforment le métier de formateur et amènent la création de masters en ingénierie de la formation. Qu’est–ce que ces nouvelles normes questionnent sur l’accompagnement de l’étudiant, sur les apports qui lui sont transmis, sur les espaces de pensées qui lui sont offerts ?

Les normes d’écritures, de certifications, de bibliographie, de mémoires n’agissent–elles pas comme critères d’appartenance à des communautés de distinction entre ceux qui les maîtrisent et ceux qui n’y ont pas accès ?

Qu’apporte l’attention à ces normes dans le développement de la pensée, de l’élaboration ? Et la soutenance ou la publication ne seraient–elles pas cette norme qui fonctionne comme un rite de passage entre les pairs qui peuvent s’émanciper de la norme, jouer avec, et ceux qui n’y ont pas accès parce qu’ils ne possèdent pas les codes ?

Qui est donc « norme » que l’on pourrait presque personnifier ?



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Dossier coordonné par Irène Kontomichos, membre du Comité de rédaction, responsable de formation à l’IFME à Nîmes

(irene.kontomichos@ifme.fr)

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