Thème : Parcours d’orientation, d’insertion et liens formation-emploi
2.1. Orientation et différenciations des parcours
2.2. Insertion et liens formation-emploi
2.3. Conditions d’accès et d’exercice des professions
Responsables de thème : G. Farges et J. Murdoch
Participants statutaires au thème : Claire Bonnard, Jean Bourdon (émérite), Thierry Chevaillier (émérite), Magali Danner, Carine Erard, Géraldine Farges, Jean-François Giret, Pierre Billet (PAST), Christine Guégnard, Gérard Lassibille, Denis Loizon[1], Jake Murdoch, Georges Solaux (émérite), Loïc Szerdahelyi.
Associée : Joelle Demougeot-Lebel
Ce thème, qui s’appuie sur le partenariat qu’a noué l’IREDU avec le CEREQ depuis 1976, vise à contribuer aux réflexions actuelles sur les liens entre formation et emploi en reliant l’analyse des parcours d’études aux trajectoires professionnelles à la sortie du système éducatif. Les recherches s’orientent vers une prise en compte de l’ensemble des facteurs pouvant affecter les parcours individuels (tels que le passé scolaire, le genre, l’origine sociale et culturelle, le territoire, les expériences professionnelles et extra-professionnelles), lors des phases successives d’orientation ou de réorientation au sein du système éducatif, puis sur le marché du travail. D’un point de vue méthodologique, les recherches développées au sein de ce thème se basent fréquemment sur des analyses longitudinales afin d’appréhender les trajectoires scolaires et professionnelles dans la durée. Elles se réfèrent d’un point de vue théorique aux travaux menés en économie de l’éducation ainsi qu’en sociologie de l’éducation et des professions qui permettront de nous interroger sur la valeur sociale et marchande du diplôme mais également sur l’ensemble des processus qui conduisent à segmenter les liens formation-emploi. Les recherches vont s’articuler autour de trois sous-thèmes : les processus de différenciation de parcours au sein du système éducatif, l’insertion et les liens formation-emploi, les modes de régulation des professions et la manière dont ils affectent leur condition d’accès et d’exercice.
2.1. Orientation et différenciations des parcours
De nombreuses recherches comparatives ont étudié comment les différents systèmes éducatifs par leur politique d’orientation contribuaient à accentuer ou à réduire la différenciation des parcours. Elles soulignent notamment les effets de cette structuration sur les inégalités sociales et économiques au niveau scolaire puis universitaire (Müller et Karle, 1993 ; Shavitet al., 2007) [2] ainsi que dans les phases de transitions entre le système éducatif et le marché du travail (Shavit, Müller, 1998)[3]. Il s’agit de comprendre comment, au delà des inégalités liées à la réussite (étudiées dans le thème 1), vont se structurer des inégalités d’orientation, plus ou moins accentuées par les différenciations en filières des systèmes éducatifs[4], notamment entre celles qui visent une insertion rapide sur le marché du travail et celles qui sont supposées faciliter les poursuites d’études.
Les travaux menés dans ce sous-thème, s’inscrivent dans le prolongement et la valorisation des recherches comparatives en cours menées au niveau international, les projets EDULIFE et PATH[5] où l’un des enjeux est d’analyser comment se construisent les mécanismes de différenciation des parcours de formation pour certaines catégories de jeunes à partir de leur l’orientation (Brinbaum, Farges, Guégnard, Murdoch).
D’autres recherches, centrées sur la France, souhaitentanalyser l’évolution des inégalités de parcours scolaires, de performances et d’orientations selon les origines sociales, migratoires et géographiques à partir des deux panels 95 et 2007 de la DEPP (Brinbaum et Farges). L’intérêt de ce projet sera de s’intéresser aux facteurs en jeu aux différents moments du parcours en cherchant à estimer les effets respectifs des caractéristiques individuelles et familiales, des aspirations, du parcours scolaire antérieur et du contexte scolaire. Axé sur la transition enseignement secondaire-supérieur, un autre projet financé par un programme FABER-PARI[6] et mené en collaboration avec le GTES[7], vise à mieux comprendre les inégalités sociales territoriales que peuvent susciter les processus d’orientation et d’admission par internet (procédure post-baccalauréat (APB) (Érard, Guégnard, Murdoch). La place des bacheliers professionnels poursuivant des études supérieures atypiques sera par exemple étudiée (Danner, Érard, Guégnard).
Enfin, les travaux sur le salariat étudiant se poursuivent à partir d’un panel longitudinal issu de l’enquête Conditions de Vie de l’Observatoire National de la Vie Etudiante dont l’IREDU a la responsabilité. Il s’agit d’étudier, dans une perspective longitudinale, les effets du salariat étudiant sur les parcours dans l’enseignement supérieur et les risques de décrochage et de réorientation qu’ils peuvent occasionner (Giret, Berthaud, Solaux).
2.2. Insertion et liens formation-emploi
Si l’effet du diplôme sur l’insertion a été fréquemment étudié dans les travaux passés de l’IREDU, notamment en référence à la théorie du capital humain, une analyse plus fine des conséquences des parcours d’études doit permettre de mieux comprendre la diversité des trajectoires et des appariements sur le marché du travail (Sattinger, 2012)[8], qui vont affecter les liens formation-emploi. Dans cette perspective, plusieurs projets vont être menés, souvent en partenariat avec le CEREQ.
Une recherche, développée en France dans le cadre des groupes d’exploitation des enquêtes Génération et qui sera menée dans une perspective de comparaison internationale en cas de succès de la réponse à l’appel à projet ANR ORA[9], portera sur les jeunes, en général peu ou pas diplômés, qui connaissent des situations durables de chômage et d’inactivité. L’objectif sera d’identifier les facteurs, scolaires et sociaux pouvant expliquer « l’enfermement » dans ces trajectoires mais aussi la sortie vers l’emploi ou les chances d’un retour en formation ou en études(Guégnard, Murdoch, Giret). Dans le prolongement des travaux de ces cinq dernières années, une autre recherche permettra également de réinterroger la question des relations formation-emploi sous l’angle des compétences supposées être requises sur le marché du travail. Une enquête menée avec le CEREQ en collaboration avec le CERTOP et l’IREDU, vise à mieux comprendre comment l’absence ou la non-utilisation de compétences générales et spécifiques, identifiées dans les référentiels de formation peuvent expliquer les situations de déclassement et de non correspondance entre formation et emploi (Giret).
Ces travaux pourront également se centrer sur des niveaux de formation ou de filières spécifiques. Deux recherches porteront sur le cas particulier de l’insertion des étudiants inscrits en STAPS à partir des enquêtes du CEREQ et d’enquêtes locales (Loizon et Érard, Guégnard, Murdoch). Il s’agira notamment d’interroger l’influence du capital sportif sur la diversité des débouchés, des parcours considérés comme les plus prestigieux à ceux paraissant plus éloignés du domaine des STAPS. Par ailleurs, les travaux sur l’accès au marché de l’emploi scientifique, thème qui a mobilisé depuis plusieurs années de nombreux chercheurs de l’équipe à partir notamment de l’analyse de l’insertion des diplômés de doctorat et des ingénieurs, vont se poursuivre (Bourdon, Bonnard, Giret). L’enjeu est de mieux comprendre les difficultés d’accès à l’emploi des jeunes docteurs notamment dans le secteur privé, en France alors que la formation doctorale est beaucoup plus valorisée dans d’autres pays. Dans ces travaux, se pose la question de la professionnalisation des formations dans l’enseignement supérieur, ses multiples facettes et les problèmes qu’elle peut soulever (Rose, 2014)[10].
2.3. Conditions d’accès et d’exercice des professions
Ce troisième sous-thème propose de se focaliser sur la manière dont les modes de régulation au sein des professions peuvent en affecter l’accès et l’exercice. Il s’agit principalement de se centrer sur les professions éducatives même si d’autres professions comme les professions artistiques par exemple, peuvent compléter l’analyse. L’objectif est ici de se centrer sur la manière dont la socialisation professionnelle, telle que le propose Dubar (1991)[11], affecte les trajectoires et les identités professionnelles. Il s’agit par exemple de discuter les dynamiques professionnelles » plus ou moins stables et spécifiques à chaque profession (Gadea, Demazière, 2009)[12].
Les recherches menées dans ce sous-thème concerneront les statuts sociaux et les trajectoires d’accès aux différents métiers de l’éducation, en comparaison avec d’autres groupes professionnels, pour intégrer les ressources que possèdent ou non les acteurs pour réaliser leur ajustement au métier dans une configuration changeante. Sont inclus des recherches qui portent sur la satisfaction au travail dans les professions enseignantes en France et à l’étranger (Bennacer, Lassibille), les déterminants de l’abandon ou de l’ajustement au métier des professeurs des écoles (Danner, Farges, Genelot, Garcia) en tenant compte notamment dans ces différents travaux, des rapports de genre. Par ailleurs, les recherches sur les professions artistiques menées à l’IREDU depuis une dizaine d’années en partenariat avec le Ministère de la Culture, complèteront cette approche (Danner, Guégnard). Si les modes de régulation diffèrent des professions enseignantes, les trajectoires d’accès et de sortie de ces professions s’inscrivent dans des marchés professionnels tout aussi structurants de leur identité professionnelle.
[1]Denis Loizon, MCF et rattaché à un autre laboratoire de l’Université de Bourgogne, a intégré officiellement l’IREDU en septembre 2016 mais a pu participer aux discussions sur la construction du projet.
[2] Müller W., Karle W. (1993). Social Selection in Educational Systems in Europe. European Sociological Review 9(1), 1-23 ; Shavit Y., Arum R.,Gamoran A. (2007). Stratification in Higher Education: A Comparative Study, Studies in social inequality. Palo Alto : Stanford University Press.
[3] Shavit Y., Müller W. (1998). From School to Work: A Comparative Study of Educational Qualifications and Occupational Destinations. Oxford : Clarendon press
[4] Jackson M. (2013). Determined to Succeed? Performance versus Choice in Educational Attainment. Palo Alto : Stanford University Press
[5] Projet Education as a Lifelong Process – Comparing Educational Trajectories in Modern Societies, projet coordonné par HP. P Blossfeld de l’Université Européenne de Florence, Projet Pathways, Aspirations, Tracking and access to Higher education coordonné par C. Imdorf, Université de Bâle.
[6] Projet financé par le Conseil Régional pour les enseignants chercheurs nouveaux arrivants.
[7] Le Groupe de Travail sur l’Enseignement Supérieur, animé par le CEREQ, permet dans cette recherche de nouer des collaborations avec des centres associés au CEREQ et des observatoires locaux de la vie étudiantes sur Strasbourg, Rennes, Tours, Montpellier et Paris notamment.
[8] Sattinger M. (2012). Qualitative Mismatches. Foundations and Trends in Microeconomics, 8(1-2), 1-168.
[9]L’IREDU est le partenaire français d’un consortium ayant répondu sur ce thème à l’appel à projets internationaux ORA Open Research Area for the social sciences” en partenariat avec le WZB (WZB – Berlin Social Science Center), le Research Centre for Education and the Labour Market, Maastricht), le Département d’Education d’Oxford et la Faculté d’étude sociale de la Doshisha Université, Japon).
[10] Rose J. (2014). Mission insertion, un défi pour les universités. Rennes : Presses Universitaire de Rennes.
[11] Dubar C. (1991). La socialisation, construction des identités sociales et professionnelles. Paris : Armand Colin.
[12] Demazière D., Gadéa C. (dir.) (2009). Sociologie des groupes professionnels : acquis récents et nouveaux défis. Paris : La découverte.