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Journées d’étude à Nantes « Jeunes et employeurs : des attentes en emploi et des représentations inconciliables ? »

Journées d’étude pluridisciplinaire – Appel à communications

Jeunes et employeurs : des attentes en emploi et des représentations inconciliables ?

7 et 8 novembre 2024 – Nantes

À la suite de la crise Covid, l’activité économique reprend et les entreprises ont besoin de recruter. D’après les chiffres de la Dares, les tensions en 2021 concernent « pratiquement tous les métiers » : sept métiers sur dix sont en tension forte ou très forte (Niang et al., 2022).

Un nombre important de travaux mettent en avant le problème d’inadéquation entre la formation des jeunes entrants sur le marché du travail et les besoins des entreprises (Frétigné, 2011 : Giret et al., 2005 ; Couppié et al., 2009, etc.). Ce constat rejoint une majorité de travaux portant sur les questions d’employabilité et du lien formation emploi qui supposent que les difficultés de recrutement sont avant tout liées à une offre de travail peu ou mal formée, voire inadaptée (Estrade, 2013 ; Fondeur & Zanda, 2009). Ces journées d’étude ont cependant pour objectif d’interroger d’autres phénomènes jusqu’à présent moins étudiés, mais qui pourraient aussi expliquer ce contexte de forte tension et de difficultés de recrutement.

Nous proposons deux grands axes. Le premier vise à chercher des pistes d’explication à partir de la façon dont les jeunes se représentent les attentes des employeurs et dont ils valorisent leurs compétences qu’ils pensent utiles pour leur insertion professionnelle. En outre, les premières expériences en emploi peuvent être source de désillusion, en particulier parce que l’activité n’est pas celle que les jeunes se représentaient. Le deuxième axe interroge les employeurs et leurs représentations de la jeunesse ainsi que les critères qu’ils valorisent à l’embauche. Leurs stratégies pour attirer et garder les salariés seront aussi à interroger. Les nouvelles formes d’organisation du travail répondent-elles aux attentes et aux profils des jeunes ?

AXE 1 : Les jeunes

1.1 Leur connaissance du marché du travail et la valorisation de leurs compétences

« À force d’entendre nombre d’entreprises se plaindre d’avoir des « difficultés » à recruter, on en oublie parfois que le marché du travail possède deux versants. Les candidats peinent eux aussi à entrer en relation avec les entreprises et à se faire valoir auprès des recruteurs » (Marchal, 2019, p. 9). Nous souhaitons en effet interroger dans ce sous-axe les jeunes et leurs connaissances des attentes des employeurs. Les difficultés de recrutement peuvent en effet être liées à la méconnaissance des jeunes des processus de recrutement et des qualités attendues lors de l’embauche.

En particulier, la prégnance des compétences sociales ou soft skills dans le discours des employeurs et le nombre de travaux analysant leurs effets sur le marché du travail (Heckman et al., 2006 ; Kuhn et Weinberger, 2005 ; De Larquier et Marchal, 2020 ; Albandea et Giret, 2018, etc.) invitent à mieux connaître la perception des jeunes concernant ces compétences plus transversales : ont-ils conscience de leur poids à l’embauche ? Comment les définissent-ils ? Quelles stratégies mettent-ils en place pour les valoriser sur le marché du travail ?

Les communications pourront également porter sur la question du rapport au travail des jeunes, entendu dans un sens élargi (Longo, 2018), et notamment ce qu’ils souhaiteraient en emploi (Méda et Vendramin, 2013 ; Coutrot et Pérez, 2022), si elles se rapportent aux difficultés de recrutement soulignées précédemment. Les jeunes peuvent avoir un avis critique en s’opposant aux conditions d’insertion et aux « codes de la recherche d’emploi ». Ces jeunes expérimenteraient alors une « insertion refusée » selon Delès (2018). Leurs attentes en matière d’emploi s’inscrivent-elles dans les nouvelles formes d’organisation du travail qui prétendent remettre en cause le modèle classique, hiérarchique de l’entreprise et le système capitaliste (Linhart, 2021) ? Les discours de jeunes qui remettent en cause le compromis capitaliste de l’accumulation et de l’inégale distribution des richesses entre le capital et le travail se retrouvent notamment dans le cadre de la lutte environnementale (comme ceux des déserteurs d’Agro Paris Tech en 2022). Mais sont-ils si nombreux ?

1.2 Les difficultés des jeunes en emploi et en activité

Mettre l’accent sur les softs skills et le manque ou l’inadéquation des compétences des jeunes permet de centrer l’attention sur l’individu en vue de cadrer les exigences réelles du travail et de masquer les contraintes liées à l’activité professionnelle, comme en témoigne la profusion de référentiels de compétences. Or, plus les conditions de travail sont difficiles, plus les chances de connaitre des difficultés de recrutement sont élevées, en particulier pour les employés et les ouvriers (Coutrot, 2022). Le manque d’attractivité des métiers peu qualifiés participe ainsi à expliquer les difficultés de recrutement des entreprises : lorsque les conditions de travail sont difficiles, les employeurs peinent à recruter, mais également à « fidéliser le personnel » (Coutrot, 2022, p. 3 ; Lhommeau et Rémy, 2020). Des interventions pourront porter sur des métiers plus qualifiés qui valorisent une forte dimension expressive du travail (Couronné, 2019) dans lesquels les jeunes peuvent aussi rencontrer des difficultés ou des formes de désillusion. Cottin-Marx (2021) montre par exemple qu’en choisissant de travailler dans des associations, les jeunes sont en partie motivés par des dimensions expressives et notamment 3 le respect de leurs valeurs, mais ils sont parfois « déçus ». Simon (2022) s’interroge sur la notion « d’entreprise fantôme » renvoyant aux attentes déçues des jeunes qui s’expliqueraient par des activités en emploi n’ayant que peu de sens. Plus généralement, la question de la désillusion revient à poser la question des conditions réelles ou empêchées (Clot, 2010) de construire collectivement du sens au travail dans un contexte économique, écologique et géopolitique plus incertain aujourd’hui qu’hier.

AXE 2 : Les employeurs et employeuses

2.1. Les représentations et les attentes des employeurs et employeuses

La prise de décision des recruteurs lors de processus d’embauche dépend de nombreux paramètres qui peuvent relever à la fois du type d’information que les recruteurs possèdent à propos des candidats et du jugement personnel. Les recruteurs tentent de maximiser leurs intérêts et d’embaucher les candidats les plus compétents et les plus faciles à former une fois en emploi (Desrumaux et Zagrodnicki, 2003). Comment les employeurs tentent-ils de satisfaire ces exigences ? Quels sont les profils qu’ils valorisent ? Certains signaux à l’embauche (Spence, 1973) ont-ils un poids plus important dans un contexte de forte pénurie de main-d’œuvre voire une situation qui se rapproche du plein emploi ? Pour certaines entreprises, les difficultés de recrutement sont davantage liées au « manque d’habitude de recruter » que du contexte global de tension (Lhommeau et Rémy, 2019, 2020). Le manque de formation au recrutement peut accentuer les risques de biais de recrutement (Arvey et Campion, 1982) ou d’homophilie (Hidri, 2009). Les recruteurs identifient davantage de caractéristiques négatives chez les jeunes du simple fait de leur âge (Dagnaud, 2013), et il est difficilement envisageable que ces représentations voire ces a priori n’influencent pas les décisions en matière de recrutement (Cortesero, Mélo, Mesiana & Vendassi, 2018). En outre, les compétences sociales et les softs skills fortement mises en avant dans les offres d’emploi ou dans les discours des employeurs invitent à mieux connaître la façon dont les employeurs repèrent les softs skills lors des processus de recrutement (CV, entretien d’embauche, période d’essai, etc.) (Albandea, 2022). S’intéresser aux softs skills attendus permet aussi de révéler certaines représentations et attentes sur la jeunesse. Les travaux de cet axe porteront ainsi sur les caractéristiques des jeunes que les employeurs mettent en avant lors du recrutement, sur leurs représentations de la jeunesse et sur leurs stratégies de recrutement et les difficultés rencontrées lors de l’embauche.

2.2. L’adaptation des entreprises aux nouvelles attentes des jeunes ?

Pour aller plus loin que ce qui se joue lors du recrutement, ce dernier axe s’intéresse à la relation entre salariés et employeurs dans l’entreprise. Contrairement à ce que le concept de « marché du travail » 4 sous-entend, la relation d’emploi n’est pas une relation marchande puisque l’employeur achète la force de travail du salarié et s’approprie le produit de son travail (De Larquier, 2023). Il est alors davantage question de relation d’autorité. Mais qu’en est-il dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre, lorsque les entreprises doivent se réinventer pour attirer et garder les jeunes salariés ? Des communications pourront s’intéresser à la façon dont des entreprises cherchent à « libérer le travail » (Coutrot, 2018). En particulier, nous pourrions nous intéresser à la manière dont les représentations sur les prétendues spécificités de la jeunesse influencent l’organisation du travail, comme certains dispositifs managériaux dits « innovants » (Flécher, 2023 ; Bosvieux-Onyekwelu et Boussard, 2022). D’autres communications pourront s’intéresser à des entreprises qui cherchent à mettre en place des relations d’apprentissage au travers du mentorat (Abonneau, Campoy, 2014). Ces « nouvelles » organisations du travail modifient-elles sensiblement le rapport salarial qui repose notamment sur une relation d’autorité ? Il semblerait d’ailleurs que les employeurs proposent davantage de réduire ou d’aménager le temps de travail sans pour autant modifier sensiblement l’activité en elle-même (Albandea, David, Roupnel, Bernard, à paraitre, 2024). Il n’est pas ou peu question d’émanciper le travail en améliorant les conditions en emploi. Cela revient à se demander comment les employeurs peuvent créer les conditions d’un travail délibéré. Car c’est aussi dans la délibération sociale sur le travail réel que peuvent émerger de nouvelles organisations du travail et de nouvelles ressources psychosociales de l’action au quotidien dans l’emploi occupé. Les employeurs ont le pouvoir et certainement le devoir de créer les conditions de cette vitalité du dialogue sur les problèmes concrets du travail réel. Cette vitalité qui « est celle de la conflictualité des points de vue, de la controverse dans la discussion (de) la force du différend » (Severac, p.51) est incontournable au développement des pouvoirs d’agir des salariés et de leurs managers.

Les propositions de communications de 4000 signes maximum (espaces et bibliographie compris) devront présenter l’ancrage disciplinaire, la problématique de recherche, la méthodologie, et les éléments centraux du développement. Les propositions peuvent provenir des différentes disciplines s’intéressant aux jeunes et au travail (économie, sciences de l’éducation et de la formation, sciences de gestion, sociologie, psychologie). Nous encourageons les communications de jeunes chercheurs et chercheuses (doctorant·es, post-doctorant·es, ATER, chercheur/ses sans poste, etc.). Les propositions peuvent porter sur la France ou sur tout autre pays où ces questions trouvent une résonnance. Une attention particulière sera portée aux communications qui proposent une confrontation des regards entre les entreprises et les jeunes.

Les réponses à cet appel à communications doivent être envoyées 5 avant le 15 mai 2024 à arthur.imbert@univ-nantes.fr et ines.albandea@univ-nantes.fr.

Une réponse sera apportée à chacun·e avant la fin du mois de juin.

Bibliographie

Abonneau, D. & Campoy, E. (2014). « Étude de la relation d’apprentissage à travers le prisme du mentorat : fonctions de mentorat et rôle médiateur de l’engagement sur l’intention de quitter », Revue de gestion des ressources humaines, n°91, p. 29-42.

Albandea, I. & Giret, J.-F. (2018). « The Effect of soft skills on French post-secondary graduates earnings », International Journal of Manpower, vol. 39, n°6, p. 782-799.

Albandea, I. (2020). « La perception des parcours d’études non linéaires par les recruteur·euse·s », L’Orientation scolaire et professionnelle, vol. 49, n°1, p. 37-66.

Albandea, I. (2022). « The vignettes method for evaluating the social skills recruiters expect », International Journal of Lifelong Education, p. 1-16.

Albandea I., David P., Roupnel Fuentes M., Bernard P.-Y. (2024, à paraître), « Des stratégies de recrutement en peine pour faire face à la pénurie de main-d’œuvre dans les métiers peu qualifiés. Une analyse en termes de registres de représentations », Formation emploi.

Arvey, R. & Campion, J. (1982). « The employment interview : A summary and review of recent research », Personnel Psychology, vol. 35, n°2, p. 281-322.

Bosvieux-Onyekwelu, C. & Boussard, V. (2022). « Moraliser le capitalisme ou capitaliser sur la morale », Actes de la recherche en sciences sociales, n°241, p. 4-15.

Clot, Y. (2010). Le travail à cœur. Pour en finir avec les risques psychosociaux. La Découverte.

Clot, Y. & Simonet, P. (2015). « Pouvoirs d’agir et marges de manœuvre », Le Travail Humain, vol. 78., n°1, p. 31-52.

Cortesero, R., Mélo, D., Meziana, Y. & Vendassi, P. (2019). « Les jeunes, ressources et risques pour l’entreprise ? Regards de recruteur·euse·s sur la jeunesse. INJEP, études et recherches, 11. Cottin-Marx, S. (2021). C’est pour la bonne cause ! : Les désillusions du travail associatif. Éd. de l’Atelier.

Couppié, T., Giret, J. F., & Lopez, A. (2009). « Obtenir un emploi dans son domaine de formation: un enjeu très relatif dans l’insertion des jeunes », Agriculture 21, 21, 13.

Couronné, J. (dir.) (2019). « Pour une approche plurielle du rapport au travail », INJEP notes & rapports.

Coutrot, T. (2022), « Quelles sont les conditions de travail qui contribuent le plus aux difficultés de recrutement dans le secteur privé ? », Dares analyses, n°26. 6

Coutrot, T. & Pérez, C. (2022), Redonner du sens au travail : Une aspiration révolutionnaire. Ed. du Seuil.

De Larquier, G. & Marchal, E. (2020). « Des compétences aux qualités professionnelles : Les repères de la sélection des candidats à l’emploi et leur évaluation ». Travail et emploi, n°163, p. 5-43.

De Larquier, G. (2023). « L’entreprise et la gestion de l’emploi » in Grand manuel d’économie politique, Dunod, p. 527-535.

Delay B. (2008). « Les jeunes : un rapport au travail singulier. Une tentative pour déconstruire le mythe de l’opposition entre les âges », Document de travail du Centre d’études de l’emploi, n° 104.

Delès, R. (2018). Quand on n’a « que » le diplôme…, PUF. Estrade, M.-A. (2008), « Une prospective socio-économique du travail et de l’emploi peu qualifié », L’emploi, nouveaux enjeux–Édition, pp. 27-39.

Estrade, M.-A. (2013). « Les emplois non pourvus : mythes et réalités », Regards croisés sur l’économie, vol 1, p. 151-167.

Eymard-Duvernay, F. & Marchal, E. (1996). Façons de recruter. Métailié.

Flécher, M. (2023). « Produire de l’auto-engagement au travail. Modalités du travail d’organisation dans une start-up en croissance », La revue de l’IRES, n°109, p. 3-34.

Fondeur, Y. et Zanda, J. L. (2009), « Les emplois vacants », Connaissance de l’emploi du CEE, vol. 64.

Frétigné, C. (2011). « Par-delà l’adéquationnisme méthodologique. Revisiter les médiations entre formation et emploi », Recherches en éducation, (11).

Giret, J., Lopez, A. & Rose, J. (2005). Des formations pour quels emplois ?, La Découverte.

Giret, J. -F. & Issehnane, S. (2012). « L’effet de la qualité des stages sur l’insertion professionnelle des diplômés de l’enseignement supérieur », Formation emploi, n°117, 29-47.

Heckman, J., Stixrud, J. & Urzua S. (2006). « The Effects of Cognitive and Noncognitive Abilities on Labor Market Outcommes and Social Behavior », Journal of Labor Economics, vol. 24, n°3, p. 411-482.

Hidri, O. (2009). « « Qui se ressemble s’assemble…»: le recrutement des jeunes diplômés dans les professions de cadre commercial », Formation emploi, n°105, p. 67-82.

Kuhn, P. & Weinberger, C. (2005). « Leadership Skills and Wages », Journal of Labor Economics, vol. 23, n°3, p. 395-436. Leblanc, G. (2004). Les maladies de l’homme moderne. Ed. du Passant.

Lemistre, P. (2015). « La professionnalisation des formations initiales : une solution aux mutations du marché de l’emploi pour les jeunes? », Revue française de pédagogie, n°192, 61-72. 7

Lhommeau, B., & Rémy, V. (2020). « Quels liens entre tension sur le marché du travail, difficultés de recrutement et efforts de recherche des employeurs ? » Travail et Emploi, n°163, p. 45-82.

Lhommeau, B., & Rémy, V. (2022), « Les critères de sélection du candidat : un résumé du processus de recrutement », Economie et Statistique, n°534(1), p. 61-81.

Linhart, D. (2021), L’insoutenable subordination des salariés, Erès.

Longo, M. (2018). « Rapports des jeunes au travail, pratiques d’emploi et diplômes », Agora Débats/Jeunesses, n°79, 2, p. 67-85.

Marchal, E. (2019). Les embarras des recruteurs : enquête sur le marché du travail. Ed. de l’EHESS. Méda, D., & Vendramin, P. (2013). Réinventer le travail. PUF.

Mercure D., Vultur M., Fleury C. (2012). « Valeurs et attitudes des jeunes travailleurs à l’égard du travail au Québec : une analyse intergénérationnelle », Relations industrielles, vol. 67, n°2, p. 177-198.

Niang, M., Lainé, F., & Chartier, F. (2022), « Les tensions sur le marché du travail en 2021 ». Dares Résultats, n°45.

Regnault G. (2016), Les jeunes et le monde du travail. Emploi et vie en entreprise, L’Harmattan, Paris.

Séverac, P. (2022). Puissance de l’enfance. Vygotski avec Spinoza. Librairie Philosophique J. Vrin. Simon, T. (2022). « L’entreprise fantôme» entre fidélité et désertion: deux modalités du rapport des jeunes diplômés à l’entreprise? », Thèse de doctorat, Université Panthéon-Sorbonne-Paris I.

Comité scientifique :

Ines Albandea (CREN)

Julien Berthaud (CEREQ, IREDU)

Claire Bonnard (IREDU)

Guillaume Cuny (Centre Pierre Naville, CREN)

Romain Delès (Centre Émile Durkheim)

Jean-François Giret (IREDU)

Arthur Imbert (CREN)

Maria Eugenia Longo (INRS)

Manuella Roupnel Fuentes (CREN)

Pascal Simonet (CREN)

extrait:
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Journées d’étude pluridisciplinaire – Appel à communications

Jeunes et employeurs : des attentes en emploi et des représentations inconciliables ?

7 et 8 novembre 2024 – Nantes

À la suite de la crise Covid, l’activité économique reprend et les entreprises ont besoin de recruter. D’après les chiffres de la Dares, les tensions en 2021 concernent « pratiquement tous les métiers » : sept métiers sur dix sont en tension forte ou très forte (Niang et al., 2022).

Un nombre important de travaux mettent en avant le problème d’inadéquation entre la formation des jeunes entrants sur le marché du travail et les besoins des entreprises (Frétigné, 2011 : Giret et al., 2005 ; Couppié et al., 2009, etc.). Ce constat rejoint une majorité de travaux portant sur les questions d’employabilité et du lien formation emploi qui supposent que les difficultés de recrutement sont avant tout liées à une offre de travail peu ou mal formée, voire inadaptée (Estrade, 2013 ; Fondeur & Zanda, 2009). Ces journées d’étude ont cependant pour objectif d’interroger d’autres phénomènes jusqu’à présent moins étudiés, mais qui pourraient aussi expliquer ce contexte de forte tension et de difficultés de recrutement.

Nous proposons deux grands axes. Le premier vise à chercher des pistes d’explication à partir de la façon dont les jeunes se représentent les attentes des employeurs et dont ils valorisent leurs compétences qu’ils pensent utiles pour leur insertion professionnelle. En outre, les premières expériences en emploi peuvent être source de désillusion, en particulier parce que l’activité n’est pas celle que les jeunes se représentaient. Le deuxième axe interroge les employeurs et leurs représentations de la jeunesse ainsi que les critères qu’ils valorisent à l’embauche. Leurs stratégies pour attirer et garder les salariés seront aussi à interroger. Les nouvelles formes d’organisation du travail répondent-elles aux attentes et aux profils des jeunes ?

AXE 1 : Les jeunes

1.1 Leur connaissance du marché du travail et la valorisation de leurs compétences

« À force d’entendre nombre d’entreprises se plaindre d’avoir des « difficultés » à recruter, on en oublie parfois que le marché du travail possède deux versants. Les candidats peinent eux aussi à entrer en relation avec les entreprises et à se faire valoir auprès des recruteurs » (Marchal, 2019, p. 9). Nous souhaitons en effet interroger dans ce sous-axe les jeunes et leurs connaissances des attentes des employeurs. Les difficultés de recrutement peuvent en effet être liées à la méconnaissance des jeunes des processus de recrutement et des qualités attendues lors de l’embauche.

En particulier, la prégnance des compétences sociales ou soft skills dans le discours des employeurs et le nombre de travaux analysant leurs effets sur le marché du travail (Heckman et al., 2006 ; Kuhn et Weinberger, 2005 ; De Larquier et Marchal, 2020 ; Albandea et Giret, 2018, etc.) invitent à mieux connaître la perception des jeunes concernant ces compétences plus transversales : ont-ils conscience de leur poids à l’embauche ? Comment les définissent-ils ? Quelles stratégies mettent-ils en place pour les valoriser sur le marché du travail ?

Les communications pourront également porter sur la question du rapport au travail des jeunes, entendu dans un sens élargi (Longo, 2018), et notamment ce qu’ils souhaiteraient en emploi (Méda et Vendramin, 2013 ; Coutrot et Pérez, 2022), si elles se rapportent aux difficultés de recrutement soulignées précédemment. Les jeunes peuvent avoir un avis critique en s’opposant aux conditions d’insertion et aux « codes de la recherche d’emploi ». Ces jeunes expérimenteraient alors une « insertion refusée » selon Delès (2018). Leurs attentes en matière d’emploi s’inscrivent-elles dans les nouvelles formes d’organisation du travail qui prétendent remettre en cause le modèle classique, hiérarchique de l’entreprise et le système capitaliste (Linhart, 2021) ? Les discours de jeunes qui remettent en cause le compromis capitaliste de l’accumulation et de l’inégale distribution des richesses entre le capital et le travail se retrouvent notamment dans le cadre de la lutte environnementale (comme ceux des déserteurs d’Agro Paris Tech en 2022). Mais sont-ils si nombreux ?

1.2 Les difficultés des jeunes en emploi et en activité

Mettre l’accent sur les softs skills et le manque ou l’inadéquation des compétences des jeunes permet de centrer l’attention sur l’individu en vue de cadrer les exigences réelles du travail et de masquer les contraintes liées à l’activité professionnelle, comme en témoigne la profusion de référentiels de compétences. Or, plus les conditions de travail sont difficiles, plus les chances de connaitre des difficultés de recrutement sont élevées, en particulier pour les employés et les ouvriers (Coutrot, 2022). Le manque d’attractivité des métiers peu qualifiés participe ainsi à expliquer les difficultés de recrutement des entreprises : lorsque les conditions de travail sont difficiles, les employeurs peinent à recruter, mais également à « fidéliser le personnel » (Coutrot, 2022, p. 3 ; Lhommeau et Rémy, 2020). Des interventions pourront porter sur des métiers plus qualifiés qui valorisent une forte dimension expressive du travail (Couronné, 2019) dans lesquels les jeunes peuvent aussi rencontrer des difficultés ou des formes de désillusion. Cottin-Marx (2021) montre par exemple qu’en choisissant de travailler dans des associations, les jeunes sont en partie motivés par des dimensions expressives et notamment 3 le respect de leurs valeurs, mais ils sont parfois « déçus ». Simon (2022) s’interroge sur la notion « d’entreprise fantôme » renvoyant aux attentes déçues des jeunes qui s’expliqueraient par des activités en emploi n’ayant que peu de sens. Plus généralement, la question de la désillusion revient à poser la question des conditions réelles ou empêchées (Clot, 2010) de construire collectivement du sens au travail dans un contexte économique, écologique et géopolitique plus incertain aujourd’hui qu’hier.

AXE 2 : Les employeurs et employeuses

2.1. Les représentations et les attentes des employeurs et employeuses

La prise de décision des recruteurs lors de processus d'embauche dépend de nombreux paramètres qui peuvent relever à la fois du type d’information que les recruteurs possèdent à propos des candidats et du jugement personnel. Les recruteurs tentent de maximiser leurs intérêts et d'embaucher les candidats les plus compétents et les plus faciles à former une fois en emploi (Desrumaux et Zagrodnicki, 2003). Comment les employeurs tentent-ils de satisfaire ces exigences ? Quels sont les profils qu'ils valorisent ? Certains signaux à l’embauche (Spence, 1973) ont-ils un poids plus important dans un contexte de forte pénurie de main-d’œuvre voire une situation qui se rapproche du plein emploi ? Pour certaines entreprises, les difficultés de recrutement sont davantage liées au « manque d’habitude de recruter » que du contexte global de tension (Lhommeau et Rémy, 2019, 2020). Le manque de formation au recrutement peut accentuer les risques de biais de recrutement (Arvey et Campion, 1982) ou d’homophilie (Hidri, 2009). Les recruteurs identifient davantage de caractéristiques négatives chez les jeunes du simple fait de leur âge (Dagnaud, 2013), et il est difficilement envisageable que ces représentations voire ces a priori n’influencent pas les décisions en matière de recrutement (Cortesero, Mélo, Mesiana & Vendassi, 2018). En outre, les compétences sociales et les softs skills fortement mises en avant dans les offres d’emploi ou dans les discours des employeurs invitent à mieux connaître la façon dont les employeurs repèrent les softs skills lors des processus de recrutement (CV, entretien d’embauche, période d’essai, etc.) (Albandea, 2022). S’intéresser aux softs skills attendus permet aussi de révéler certaines représentations et attentes sur la jeunesse. Les travaux de cet axe porteront ainsi sur les caractéristiques des jeunes que les employeurs mettent en avant lors du recrutement, sur leurs représentations de la jeunesse et sur leurs stratégies de recrutement et les difficultés rencontrées lors de l’embauche.

2.2. L’adaptation des entreprises aux nouvelles attentes des jeunes ?

Pour aller plus loin que ce qui se joue lors du recrutement, ce dernier axe s’intéresse à la relation entre salariés et employeurs dans l’entreprise. Contrairement à ce que le concept de « marché du travail » 4 sous-entend, la relation d’emploi n’est pas une relation marchande puisque l’employeur achète la force de travail du salarié et s’approprie le produit de son travail (De Larquier, 2023). Il est alors davantage question de relation d’autorité. Mais qu’en est-il dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre, lorsque les entreprises doivent se réinventer pour attirer et garder les jeunes salariés ? Des communications pourront s’intéresser à la façon dont des entreprises cherchent à « libérer le travail » (Coutrot, 2018). En particulier, nous pourrions nous intéresser à la manière dont les représentations sur les prétendues spécificités de la jeunesse influencent l’organisation du travail, comme certains dispositifs managériaux dits « innovants » (Flécher, 2023 ; Bosvieux-Onyekwelu et Boussard, 2022). D’autres communications pourront s’intéresser à des entreprises qui cherchent à mettre en place des relations d’apprentissage au travers du mentorat (Abonneau, Campoy, 2014). Ces « nouvelles » organisations du travail modifient-elles sensiblement le rapport salarial qui repose notamment sur une relation d’autorité ? Il semblerait d’ailleurs que les employeurs proposent davantage de réduire ou d’aménager le temps de travail sans pour autant modifier sensiblement l’activité en elle-même (Albandea, David, Roupnel, Bernard, à paraitre, 2024). Il n’est pas ou peu question d’émanciper le travail en améliorant les conditions en emploi. Cela revient à se demander comment les employeurs peuvent créer les conditions d’un travail délibéré. Car c’est aussi dans la délibération sociale sur le travail réel que peuvent émerger de nouvelles organisations du travail et de nouvelles ressources psychosociales de l’action au quotidien dans l’emploi occupé. Les employeurs ont le pouvoir et certainement le devoir de créer les conditions de cette vitalité du dialogue sur les problèmes concrets du travail réel. Cette vitalité qui « est celle de la conflictualité des points de vue, de la controverse dans la discussion (de) la force du différend » (Severac, p.51) est incontournable au développement des pouvoirs d’agir des salariés et de leurs managers.

Les propositions de communications de 4000 signes maximum (espaces et bibliographie compris) devront présenter l’ancrage disciplinaire, la problématique de recherche, la méthodologie, et les éléments centraux du développement. Les propositions peuvent provenir des différentes disciplines s’intéressant aux jeunes et au travail (économie, sciences de l’éducation et de la formation, sciences de gestion, sociologie, psychologie). Nous encourageons les communications de jeunes chercheurs et chercheuses (doctorant·es, post-doctorant·es, ATER, chercheur/ses sans poste, etc.). Les propositions peuvent porter sur la France ou sur tout autre pays où ces questions trouvent une résonnance. Une attention particulière sera portée aux communications qui proposent une confrontation des regards entre les entreprises et les jeunes.

Les réponses à cet appel à communications doivent être envoyées 5 avant le 15 mai 2024 à arthur.imbert@univ-nantes.fr et ines.albandea@univ-nantes.fr.

Une réponse sera apportée à chacun·e avant la fin du mois de juin.

Bibliographie

Abonneau, D. & Campoy, E. (2014). « Étude de la relation d'apprentissage à travers le prisme du mentorat : fonctions de mentorat et rôle médiateur de l'engagement sur l'intention de quitter », Revue de gestion des ressources humaines, n°91, p. 29-42.

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Comité scientifique :

Ines Albandea (CREN)

Julien Berthaud (CEREQ, IREDU)

Claire Bonnard (IREDU)

Guillaume Cuny (Centre Pierre Naville, CREN)

Romain Delès (Centre Émile Durkheim)

Jean-François Giret (IREDU)

Arthur Imbert (CREN)

Maria Eugenia Longo (INRS)

Manuella Roupnel Fuentes (CREN)

Pascal Simonet (CREN)

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